La lecture à grande échelle de l’épaisseur littorale qui borde l’estuaire de la Charente, et qui s’étend plus largement au ‘marais’ poitevin et vendéen témoigne d’un équilibre entre géographie et économie du territoire. En témoignent les caractères singuliers du paysage selon que l’on considère les points bas ou les points hauts et la manière dont ils sont différemment exploités.
La situation géographique de Rochefort, à l’extrémité sud d’un relief autour duquel se dessine le méandre du fleuve, constitue un important frein à son développement. Pourtant, cette géographie de rupture est également celle qui dessine les futurs territoires de projet. D’abord en affirmant l’indispensable reconquête paysagère, spatiale et programmatique des berges du côté est, vers lesquelles la ville est originellement tournée. Ensuite, en révélant les opportunités intra-muros que la ville a de se densifier sur elle-même : les limites territoriales au développement de Rochefort conduisant à réinvestir la ville depuis l’intérieur.
Jusqu’à l’époque contemporaine, l’économie du territoire s’est adaptée à cette condition à la fois maritime et fluviale, les berges restant des espaces ouverts, perméables et canalisés, dévolues à des activités de constructions navales. Ces structures paysagères de maîtrise et de circulation de l’eau ont en grande partie disparues au profit de logiques de plateformes. Inadaptées aux fluctuations des zones humides littorales, ces dernières participent également à rompre le lien entre ville et fleuve et rendent aujourd’hui les espaces riverains particulièrement vulnérables.
Be kind rewild, est une tentative pour retablircet équilibre rompu entre espace productifs, pratiques habitantes et géographie riveraine. Il s’agit d’une part de faire de l’activité portuaire une dynamique non plus seulement économique mais aussi structurante des espaces de la ville, en ne considérant plus ce territoire comme une marge mais plutôt comme une centralité. D’autre part il est question de reprogrammer la zone industrielle de l’Arsenal vers une économie, des pratiques, et des structures paysagères résolument tournées vers le milieu littoral.
L’incertitude et les fluctuations des phénomènes géographiques rochefortais sont envisagées comme des leviers de projets. Ils nous conduisent à imaginer trois niveaux d’intervention : un urbanisme éphémère, un urbanisme mutable, un urbanisme structurant. Ce sont trois formes d’économie, d’affectation et de pratiques des sols pensées en fonction de l’exposition des sites aux fluctuations du trait de rivage dans le temps.
Nous proposons trois actions pionnières, imaginable dans le temps du politique et de la programmation urbaine. Elles ont vocation à poser les conditions de ces mutations et de les inscrire dans le temps long : accueillir en reconstituant les structures paysagères riveraines de gestion de l’eau, inclure en ouvrant les grandes emprises productives sur la ville, ré-enchanter en rendant l’espace de la ville à des pratiques habitantes apaisées.